Tommaso Stettler – Celui qu’on appelait le « Doctor of beer”

Tommaso Stettler – Celui qu’on appelait le « Doctor of beer”

Qui est Tommaso Stettler ? 

Tommaso est le maître brasseur de WhiteFrontier à Martigny, en Valais, dans les Alpes suisses. 

Voilà maintenant plusieurs mois qu’il a rejoint notre équipe. Nous lui avons laissé le temps de prendre ses marques avant de le faire passer devant notre micro pour apprendre à le connaître. Un brasseur est à une brasserie ce qu’un cuisinier est à un restaurant. Il en est l’âme, mais également le garant de la qualité et de la réputation. Il nous tient à cœur de vous présenter Tommaso Stettler, cet homme passionné et créatif, qui écoute du Bob Dylan à fond dans la brasserie.

Pour apprendre à le connaître, commençons par le commencement…

un homme avec une barbe qui se renverse de la bière dessus.

Qui était le Tommaso enfant ?

Je suis né à Florence, en Toscane. J’ai grandi dans une campagne sublime, qui surplombe la ville, avec mes parents et mes deux frères. 

Ah ok, je comprends mieux ton sens de l’esthétique et ton obsession du goût… 


Ah bon, pourquoi ? Et bien parce que tu as grandi à Florence, la ville de l’art par excellence, entourée par de magnifiques collines de Chianti… 

Allez, pardon, je te laisse continuer. 

Aahaha, oui, c’est vrai… Ma maman, elle aussi, est née à Florence et mon papa est né en Suisse, à Sainte-Croix. Il voyageait beaucoup. Mes frères et moi, on a pu jouir d’une enfance épicurienne où les bons produits étaient au centre de notre table familiale. C’est grâce à cette grande ouverture d’esprit et aux nombreux voyages en famille, que très jeune, je me suis pris d’amour pour la cuisine. 

Chaque année, toute la famille partait passer les vacances dans la campagne bernoise pour visiter Nonno, mon grand-père. L’odeur est un de mes souvenirs les plus forts quand je repense à mes voyages en Suisse. Une odeur fraîche d’air pur, de vaches et de grands espaces. Je me rappelle aussi des grands déjeuner le matin, tous autour d’une table, des balades en famille et des chevauchées à vélo. 

Qu’est-ce qu’il faisait de son temps libre le petit Tommaso Stettler ? 

Je jouais au foot. J’adorais ça et j’y passais presque tout mon temps libre. Cette activité réunissait tout ce que j’aime. Le défi sportif, le travail d’équipe, les copains et la discipline. 

Ok alors là, tout de suite, on ne s'imagine pas le gars épicurien excuse-moi. On imagine le gars qui boit de la bière cheap, qui mange des chips et une vieille saucisse trop cuite au bbq. 

Aussi étrange que cela puisse paraître, tu peux être footballer et épicurien, les deux sont compatibles. Si si, je t’assure. J’ai réussi à combiner ma passion pour le football et l’épicurisme dont je faisais preuve. 

Comment est née ta passion pour la bière, la craft je veux dire ?
 

C’est avant tout un héritage de mon papa. Il était parti vivre en Angleterre pendant environ 2 ans quand il était tout jeune adulte, dans les années 70. Il s’est pris en affection pour ces ale si typiques de l’Angleterre. Cette passion pour les bières atypiques est restée et m’a été transmise. 

À la fin de mon adolescence, dans les années 2000, la consommation de bière en Italie était principalement composée de Lager. De tous mes copains, j’étais celui qui buvait les bières « bizarres », des Brown Ale, des stouts, ça a toujours été mon truc. 

Tu es passé d’amateur de bons produits, et particulièrement de bières, à brasseur professionnel, comment tu t’y es pris ? Peut-être que certaines personnes qui nous lisent se demandent comment on devient brasseur ? 
Pour être tout à fait honnête, je ne voulais pas être brasseur. D’ailleurs, je ne savais même pas que c’était possible, car dans les années 2010, en Italie, il n’existait pas de formation de brasseur. Non, ce que je voulais, c’était être cuisinier. Aussi loin que je me rappelle, j’ai toujours voulu faire de la cuisine. Mais… influencé par mes parents, j’ai décidé de passer un diplôme en Science and Food technologie à l’université de Florence et de remettre la cuisine à plus tard. Pendant mes études, je me suis très vite intéressé à la bière, d’ailleurs mes profs et les autres étudiants m’appelaient « Doctor of beer ». 

Florence est la capitale de la Toscane, et la Toscane, c’est le pays du vin. Comment on traite un étudiant passionné de bière dans le pays du Chianti ? 
On le traite bien, même si, plusieurs fois, on m’a dit que mon profil ne correspondait pas à la bière. « La bière, c’est un secteur industriel, avec peu de créativité, tu ne vas jamais t’épanouir là-dedans » me disait mon professeur. J’aimerais quand même dire qu’aujourd’hui, 15 ans plus tard, l’université de Florence a une section entièrement dédiée aux métiers autour de la bière. 
Il devrait l’appeler le département Stettler ! Ahaha 

Tu as donc nagé à contre-courant pour aller au bout de ton projet. Comment as-tu fait pour prouver qu’il y avait un avenir dans la Craft beer ?
Le meilleur moyen pour essayer de convaincre tout le monde, c’était d’y consacrer mon sujet de thèse. Mais pour valider mon diplôme, il me fallait un stage en brasserie, et ça, autant vous dire que ça n’était pas une mince affaire. J’ai mis plus d’un an à trouver mon premier stage… Je commençais à croire qu’ils avaient tous raison…

Alors qui est le premier fou qui a décidé de te donner ta chance ?
 
C’est Birrificio Granducato qui m’a ouvert ses portes pendant 3 mois, puis s’en est suivi toute une série de stages jusqu’à la fin de mon master, et même encore après. À cette époque, j’avais soif d’apprendre, je voulais enchaîner les expériences et emmagasiner un maximum de connaissances. J’ai eu la chance de travailler pour une des plus grandes brasseries Craft italiennes de l’époque, Birrificio del Ducato.  

birrificio del ducto - gamme

J’ai enchaîné mon parcours à Fyne Ales brewery en Écosse. 
C’est également en Écosse, dans cette brasserie, qu’avec des collègues, que nous avons lancé le projet ORIGINS, qui avait comme objectif un peu fou de créer des sours en fermentation spontanée. 

À cette époque, en 2016, créer ce genre de bière était réservé à la région de Bruxelles. Encore une fois, on nous a dit que ça ne fonctionnerait jamais. Aujourd’hui, la brasserie Fynes Ales commercialise toujours, avec un grand succès, les bières du projet ORIGINS. 

Projet origins - bières

Je suis ensuite partie en Alaska où j’ai travaillé pour 49th State Brewing. J’ai un souvenir incroyable de cette région reculée et de ce Taproom immense qui faisait un volume astronomique. J’ai appris, lors de cette expérience, à gérer une production de bière volumineuse tout en respectant de plus près la qualité de produits.  

groupe d'amis dans un taproom de brasserie

la brasserie en Alaska avec le van du film Into the wild

Après cela, j’ai eu la chance de bosser pour une cidrerie incroyable aux Etats-Unis avec qui j’ai développé le premier cidre dry-hoppé et un cidre acide avec des fruits.

Après tous ces stages, as-tu finalement pu trouver un travail ? 
Oui, ça y est, j’étais prêt. J’ai donc pris le poste de brasseur à Birrificio San Gimignano, non loin de chez moi, à Florence. Après avoir bien maitrisé la production de la core range, j’ai concentré mes efforts et ma créativité sur un projet hors normes. C’est comme cela qu’à commencé le projet Cantina Errante, une brasserie 100% fermentation spontanée, aujourd’hui notée 4/5 sur untappd avec 45 bières et environ 6000 notes. 

deux brasseurs devant des barrels

Comment tu t’es retrouvé ici à Martigny, en Suisse ? 
Je venais de me marier et je cherchais un projet global qui me parlait vraiment dans un endroit où j’avais envie de me poser. WhiteFrontier remplissait tous les critères. Une brasserie qui a 3 gammes de bières, une core range propre, stable et créative. Une gamme hyper innovante de spéciales (plus de 20 différentes par année) et une gamme de barrel aged. Martigny est au cœur des Alpes, la nature est partout, autour de la brasserie, mais ça reste une petite ville dans laquelle de nombreuses personnes de ma génération y résident. C’est très important pour moi de m’intégrer et d’être entouré par des amis et des activités sportives. 

Qu’est-ce que tu veux amener chez WhiteFrontier ? 
Je suis arrivée il y a 3 mois tout juste et il s’est passé plein de choses. J’ai dû prendre en main l’outil et m’adapter à mon nouvel environnement. Je prends aussi des cours de français et j’espère pouvoir parler la langue rapidement. Je veux faire des bières innovantes, créatives, qui surprennent et interpellent ceux qui les boivent. Mais surtout, je veux connecter avec le territoire et la nature. Et cela passe par plein d’éléments, par des ingrédients spécifiques que l’on utilise pour brasser, mais aussi par les fournisseurs, les collabs, la nourriture au Taproom et d’autres boissons qu’on pourrait y servir. Je souhaite également respecter l’environnement en mettant la nature au centre de mes préoccupations.

Tu as des passions à part la bière ? 
Les randonnées avec ma femme Heather et mon chien Malto, la cuisine, l’exploration de nouvelles saveurs, j’aime ramasser des choses lors de mes balades et les cuisiner ensuite. Je veux également trouver un sport en équipe dans laquelle m’investir et trouver plus de temps pour lire et méditer, deux activités qui prend de plus en plus de place dans ma vie.

Si les lecteurs veulent te trouver, comment ils font ? 

Alors déjà, ils peuvent venir à la brasserie, j’y suis du lundi au vendredi. Ensuite, ils peuvent me trouver sur INSTA ou Linkedin et également lire mon blog. 

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